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LA TAVERNE GUTENBERG : LA RÉSIDENCE D’ARTISTES ÉMERGENTE DE LA SCÈNE CULTURELLE LYONNAISE

 

LA GUILLOTIERE – Au cœur de Lyon, dans ce vieux quartier d’immigration, à l’angle de la rue de l’Epée jouxtant une salle de prière, la Taverne Gutenberg attire le regard du passant. La façade, ornée de grandes vitres laisse croire à un bar alternatif comme il commence à apparaître de plus en plus dans ce quartier multiculturel mythique de la cité des Gônes, habité par les chichas, cafés arabes et épiceries orientales.

Initialement publié sur : Web Arts Résistances: la Taverne Gutenberg, la résidence d’artistes émergente de la scène lyonnaise 

L’aventure de la Taverne Gutenberg débute fin 2015, lorsque des artistes, dont Henri Lamy, co-fondateur, décident de squatter ce bâtiment vétuste de trois étages presque à l’abandon, durant trois mois. L’idée séduit d’autres artistes et le lieu qui devait alors servir de résidence éphémère s’est transformé en espace d’accueil artistique permanent.

Résidence d’artistes, bar associatif, salles d’expositions collectives

Au rez-de-chaussée, les vestiges d’un bar algérien trône dans l’immense pièce qui sert aussi d’espace de travail pour les artistes résidents. Le premier étage est dédié aux nombreuses expositions qui se tiennent régulièrement. Au second, l’étage est réservé aux artistes résidents, en moyenne huit artistes qui prennent place et créent durant un à trois mois.

La Taverne attire du monde, plus de 14 000 adhérents depuis ses débuts et plus de 5000 personnes suivent les activités via une newsletter, indique Aurane Comte, responsable de la communication.  L’équipe compte sept bénévoles à temps plein, des passionnés qui ont à cœur de faire vivre ce lieu émergent de la scène culturelle lyonnaise.

Ce qui distingue la Taverne Gutenberg d’autres résidences est le fait que le public puisse visiter l’artiste en même temps qu’il créé. « On casse les codes des musées, on traverse une expo avec une bière à la main ! On veut rendre ce lieu vraiment accessible au public et ça permet aux jeunes artistes de vendre leurs œuvres » raconte Aurane Compte. Plus de 250 artistes français et étrangers ont été accueillis en résidence depuis dix-huit mois. Déjà des élus locaux viennent régulièrement : « On est connu des élus. C’est un lieu qui reste à développer. Tout le monde voit qu’il y  a une demande de la part des citoyens. C’est un projet nouveau qui attire.»

Expositions photos de l'école de théâtre
Expositions photos de l’école de théâtre

Dès les premières marches qui mènent aux étages, une ambiance particulière empoigne le visiteur. L’étroitesse de l’escalier, l’ornement des murs, l’odeur qui se dégage du bâtiment vétuste. Au bout de quelques marches, on peut voir un jeune peintre accroupi qui s’exerce sur les murs. Au premier étage, les étudiants de l’école de théâtre se préparent à la hâte pour les deux journées d’exposition qu’ils ont conçue.

Autour des expositions collectives émerge un thème qui fait écho à l’actualité, aux enjeux du quotidien, choisi par l’équipe de la Taverne.

 

« Cartographier le visage, c’est venu instinctivement ».

Au premier étage, à droite après l’escalier, dans une pièce baignée de lumière, Juliette Montier dessine au fusain, son sourire accueillant est une invitation :

« J’adore travailler l’abstraction. C’est une grande liberté. Un soir j’ai eu envie de faire des portraits. Un cheminement qui s’est imposé à moi. Les portraits sont toujours entre abstraction et figuration. A partir de la photo que j’ai prise de gens qui restent anonymes. C’est un hommage au rêve, au chemin raconté, aux héritages. Là d’où on vient. C’est un regard sur la femme d’aujourd’hui. Instinctivement je suis attirée par le regard des femmes, par leur histoire. Un travail concentré sur les visages continents, la mémoire qui marque le corps et le chemin de vie ».

Sur les murs, des esquisses de ce qu’elle imagine lorsqu’elle reproduit des visages. Son projet tourne autour de l’identité de la femme : « J’ai demandé une résidence ici pour concrétiser ce projet. Je dessinais au départ au fusain, ensuite je gravais les visages sur plexi et l’étape finale ce sont les pastels. Les portraits, ça s’est présenté à moi, ce n’est pas habituel. Au départ, je voulais aussi le faire avec des hommes. Mais en fait le contact est plus facile, plus sensible et plus sincère avec des femmes. Cartographier le visage, c’est venu instinctivement. Je suis allée chercher des contacts qui me touchent en tant que personne. J’essaie de rendre hommage à des gens qui sont, à mes yeux, importants. Sans forcément que je les connaisse personnellement ».

Juliette Montier, artiste plasticienne

Ses visages, Juliette Montier les trouvent également dans des lieux où la détresse marque le faciès, celui des réfugiés : « Je fais des interventions dans des centres d’accueil pour réfugiés. Les femmes sont super intriguées, fières et en même temps elles ne comprennent pas toujours. Il y a des portraits qui sont très abstraits ». Juliette ne se considère pas militante mais le parcours de ces femmes lui parle. Elles aussi en retour se confient sur leur drame.

« Un lieu ouvert pour tous sur l’art ».

En pleine création, Henri Lamy vide le contenu d’un pot de peinture sur une toile vierge posée au sol. « Attention ça tâche ! » prévient-il. La conversation débute ainsi, puis il revient sur les débuts du projet : « On a vu qu’il y avait plein de gens qui venaient aux expositions. C’était une idée un peu folle. Ça n’a pas été immédiat de comprendre comment transformer ça de manière économique. On supporte le projet parce qu’on est en train de devenir proprio, ça demande pas mal de sacrifices. C’est quelque chose où on se met pas mal en risque surtout qu’on est obligé de développer un business dans quelque chose qui a pour philosophie de base de ne pas en être un. Donc c’est quelque chose qui est un peu compliqué à trouver. C’est même une sorte de conflit qu’il faut arriver à résoudre de l’intérieur, entre notre philosophie altruiste et partageuse et les impératifs de payer les échéances. Le lieu se veut ouvert pour tous sur l’art ».

Ouvert aux artistes confirmés tout comme aux jeunes artistes qui ont besoin de lieu de ce genre pour faire leurs preuves. D’ailleurs, les administrateurs de la Taverne s’intéressent avant tout au projet de l’artiste, et le succès semble au rendez-vous : « Il y a mille personnes qui viennent pour les nuits sonores, cinq cent personnes pour les expos collectives. C’est incroyable de voir la queue dans la rue pour certains événements ! Et puis à côté de ça, ça fait un an et demi qu’on existe, personne n’est payé » ajoute le cofondateur de la Taverne.

Au dernier étage, une petite pièce sous les toits est en travaux. Elle servira de chambre noire pour accueillir le public et permettre aux amateurs de photographie argentique de pouvoir développer eux-mêmes leurs images. Des groupes de collégiens se sont aussi rendus à la Taverne. « On essaie de toucher tous les publics » précise Aurane Comte.

Le 29 juin, une exposition intitulée « 404 NOT FOUND » est prévue, en référence à l’inscription qui s’affiche lorsqu’un site web n’est pas accessible. Un thème qui questionne les relations d’aujourd’hui  sur la perte d’identité : « On veut faire un lien entre la création et la surconsommation de connexion, d’information. On vient de lancer un appel auprès des artistes » ajoute Aurane Comte.

site web:  http://www.taverne-gutenberg.com/

contact facebook:  https://fr-fr.facebook.com/tavernegutenberg/

 

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